Climat : renforcer la résilience en période d’instabilité
Un nouvel article de Zurich Insurance Group (Zurich) présente une feuille de route sur la façon dont les gouvernements, les assureurs et les communautés peuvent travailler ensemble pour relever les défis croissants posés par les conditions météorologiques extrêmes et les catastrophes naturelles.
Des tornades aux ouragans en passant par les inondations et les feux de forêt, partout dans le monde les phénomènes météorologiques extrêmes provoquent des ravages considérables et croissants, tant sur le plan économique qu’humain.
Au cours de la dernière décennie (2014-2023), les phénomènes météorologiques extrêmes ont entraîné des pertes économiques d’environ 2 000 milliards de dollars US.
Les perspectives sont alarmantes. La fréquence et l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes et des catastrophes naturelles augmentent, une tendance qui pourrait être exacerbée au cours des prochaines décennies par les changements à long terme des régimes climatiques. Les variations de température, la hausse du niveau de la mer et les changements dans les régimes de précipitations pourraient perturber les écosystèmes naturels, la productivité agricole et la santé humaine, ce qui entraînerait des dommages environnementaux et économiques persistants.
Les assureurs sont des spécialistes de la compréhension et de la gestion des risques associés aux conditions météorologiques extrêmes. Leur expertise est utilisée pour fournir une protection qui permet aux particuliers et aux entreprises de se remettre des catastrophes naturelles en disposant des ressources financières nécessaires à la restauration et à la reconstruction après l’événement. Rien qu’en 2023, le secteur de l’assurance a versé 108 milliards de $ US en indemnités liées à des pertes causées par des catastrophes naturelles. En plus d’offrir une protection financière, les assureurs offrent des informations, des modèles avancés et d’autres outils de gestion des risques qui peuvent jouer un rôle essentiel pour conseiller les entreprises, les gouvernements et les municipalités sur la manière de réduire les risques et donc d’accroître la résilience.
Toutefois, la sécurité financière offerte par l’assurance a ses limites. En 2023, seulement 38 pour cent des pertes mondiales causées par les conditions météorologiques extrêmes et les catastrophes naturelles étaient couvertes par une assurance. En outre, 174 milliards de $ US de pertes mondiales n’étaient pas assurés.
Plusieurs facteurs contribuent à ces pertes non assurées. Les particuliers et les entreprises peuvent sous-estimer à la fois les pertes potentielles et la probabilité qu’une catastrophe naturelle se produise, ce qui les conduit à éviter de souscrire une protection appropriée. L’abordabilité et la disponibilité de l’assurance jouent également des rôles importants. Au cours des trois dernières décennies, le coût total des pertes assurées dues aux catastrophes naturelles a augmenté plus rapidement que l’économie mondiale, doublant par rapport au PIB mondial depuis 1994. Si les pertes assurées continuent d’augmenter à ce rythme, les primes d’assurance contre les risques climatiques devront augmenter afin de refléter ces risques accrus. Cette situation pourrait influencer le niveau de protection que les particuliers et les entreprises sont disposés à acheter, avec des impacts sur le fonctionnement général du marché.
Afin de protéger les sociétés et les économies contre les menaces croissantes que représentent les phénomènes météorologiques extrêmes et les catastrophes naturelles, les gouvernements et les décideurs politiques devraient accorder la priorité à la résilience climatique. Pour ce faire, ils doivent envisager les trois réponses complémentaires suivantes:
1. Investir dans les stratégies de prévention et de réduction des risques
Les raisons d’investir dans la résilience climatique sont indéniables. Toutefois, déterminer où et comment investir dans la prévention et la réduction des risques nécessite une expertise particulière et une collaboration entre les spécialistes de divers domaines, ce qui nécessite un cadre de gouvernance solide.
Parmi les mesures recommandées pour y parvenir, citons l’intégration de la résilience climatique dans la planification nationale, la création de centres nationaux de compétences pour mettre en commun les données et l’expertise afin de prendre des décisions de planification plus éclairées, et une utilisation plus efficace de la technologie, de l’analyse des données et de la recherche scientifique pour améliorer l’évaluation des risques et la modélisation climatique. Le recours à l’expertise et à l’approche prospective de la gestion des risques du secteur de l’assurance peut aider les entreprises et les communautés à renforcer leur résilience face aux risques climatiques futurs.
2. Améliorer l’accessibilité, l’abordabilité et la transparence du marché de l’assurance
L’assurance jouera un rôle clé dans la protection et le renforcement de la résilience climatique. Cependant, si la gravité et la fréquence des événements météorologiques extrêmes continuent d’augmenter, le coût des couvertures d’assurance augmentera également. Cela signifie qu’à terme, les ménages et les entreprises pourraient être sous-assurés et même se retrouver sans assurance. Investir dans des mesures de prévention et de réduction des risques est la première étape pour relever ce défi, car la résilience constitue la meilleure assurance.
Toutefois, les gouvernements peuvent également prendre des mesures positives pour améliorer l’accessibilité et l’abordabilité de l’assurance. Par exemple, ils peuvent sensibiliser la population aux risques liés aux phénomènes météorologiques extrêmes tout en offrant des mesures incitatives aux ménages et aux entreprises pour qu’ils souscrivent une assurance adéquate. Cela peut également être réalisé en mettant en place un environnement réglementaire qui soutient la capacité du marché, attire de nouveaux joueurs et favorise la concurrence et l’innovation afin d’élargir les options de couverture pour les consommateurs.
Même si les gouvernements peuvent exercer une influence positive, les régimes réglementaires doivent rester souples afin de permettre d’ajuster les prix et les produits en fonction de l’évolution des risques climatiques. La réglementation des taux et des primes peut masquer les coûts réels associés aux risques sous-jacents, ce qui peut encourager le développement dans des zones dangereuses et décourager les investissements nécessaires pour renforcer la résilience.
Les gouvernements devraient plutôt permettre aux marchés de l’assurance de fixer des taux et des primes qui reflètent fidèlement le niveau réel de risque et les coûts associés aux réparations en cas de sinistre, selon le principe de taux en fonction des prix. Cette approche oriente les économies vers des pratiques de développement résilientes et durables et garantit une répartition efficace des ressources afin de minimiser l’exposition aux risques climatiques.
3. Développer des solutions collaboratives de partage des risques
Le renforcement de la résilience climatique nécessite un investissement dans les mesures de prévention et de réduction des risques, ainsi que l’amélioration de l’accessibilité et de l’abordabilité de l’assurance. Cependant, en raison des contraintes budgétaires, les coûts risquent d’être trop élevés pour de nombreux gouvernements. Il convient donc de développer des solutions novatrices de partage des risques et de partenariats public-privé.
Le « financement mixte », par exemple, peut contribuer à l’augmentation des investissements dans la prévention des risques et à la réduction des risques en mobilisant des fonds privés. Le secteur de l’assurance peut contribuer à débloquer ces investissements en réduisant les risques liés aux flux de capitaux.
Les partenariats public-privé pourraient également jouer un rôle pour améliorer l’accessibilité et l’abordabilité. Par exemple, la création de consortiums d’assurance ou de réassurance peut contribuer au partage des ressources et à la répartition des risques, ce qui peut améliorer l’abordabilité, en particulier dans les zones à haut risque. Les marchés privés de l’assurance peuvent fixer le prix de ces risques, tandis que les gouvernements déterminent la manière dont les pertes liées aux catastrophes naturelles sont réparties.
Une course contre la montre
L’escalade des coûts liés aux phénomènes météorologiques extrêmes et aux catastrophes naturelles souligne la nécessité urgente pour les gouvernements, les assureurs et les communautés d’agir de concert afin de renforcer la résilience climatique. Pour atteindre cet objectif, une approche multidimensionnelle s’avère indispensable et doit inclure des investissements stratégiques dans la résilience, la consolidation des marchés de l’assurance ainsi que le développement de solutions efficaces de partage des risques. Relever ces défis dès aujourd’hui permettra aux sociétés d’être mieux armées pour faire face aux menaces croissantes que représentent les phénomènes météorologiques extrêmes et les catastrophes naturelles à l’avenir, et pour s’en remettre plus rapidement.