Feux de forêt : comprendre un risque croissant

Article19 août 2021

Avant de planifier les mesures d’atténuation, de réponse et de récupération, une compréhension générale de la nature des feux de forêt et de l’évolution des conditions peut être utile.
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Cet article a été écrit par des collègues de l’ingénierie des risques de Zurich aux États-Unis.

Récemment, les feux de forêt majeurs aux États-Unis et au Canada nous ont rappelé de façon brutale que la saison des feux de forêt est arrivée et que, si les premières indications et certaines prédictions sont exactes, elle sera encore une fois sévère.

Dans une perspective plus large, les données de la NASA montrent une augmentation constante des incendies dans l’ouest des États-Unis au cours des soixante dernières années. L’Australie était déjà le continent le plus sujet aux incendies au monde, mais une augmentation du nombre de vagues de chaleur et une réduction importante des précipitations depuis les années 1970 se sont combinées pour créer des conditions de sécheresse permanentes qui ont contribué aux feux de brousse historiques et dévastateurs de 2019-20201. Les feux de forêt de Fort McMurray en Alberta ont été la catastrophe la plus coûteuse de l’histoire du Canada, et une étude récente prévoit que les risques d’incendie extrêmes dans l’Ouest canadien pourraient devenir jusqu’à six fois importants au cours de la prochaine décennie2.

Même si certains facteurs imprévisibles, comme la foudre et les incendies criminels, jouent un rôle important dans les feux de forêt, selon le consensus des scientifiques, le changement climatique continuera de provoquer des incendies plus importants et plus intenses dans les régions qui y sont sujettes3.  

Alors, face à cette réalité volatile, les entreprises, les communautés et les particuliers doivent planifier tôt et intelligemment les efforts d’atténuation, de réponse et de récupération (voir les articles ci-dessous). Toutefois, avant de faire ces plans, il est utile d’avoir une compréhension générale de la nature des feux de forêt et de l’évolution des conditions.

Quelles sont les causes des feux de forêt ?

Trois éléments sont nécessaires à la formation d’un incendie de forêt, souvent appelés le « triangle du feu » 4 :

  • Une source de chaleur : il peut s’agir du soleil, d’un éclair ou d’une allumette allumée.
  • Un combustible : il peut s’agir de n’importe quelle matière inflammable, de l’herbe sèche et morte, des feuilles et des arbres, ainsi que certaines formes de végétation vivante.
  • De l’oxygène : le feu se nourrit d’oxygène, qui augmente avec les vents forts, contribuant ainsi à la propagation du feu.

Les feux de forêt représentent une partie naturelle — et souvent essentielle — de notre écosystème, mais comme les tempêtes destructrices, leur puissance peut rapidement submerger les régions et leurs habitants. De plus, même si certains feux de forêt sont déclenchés naturellement, l’activité humaine est responsable de près de 85 % des feux de forêt aux États-Unis selon les estimations5.

L’activité humaine qui peut déclencher des incendies :

  • Les faux de camp laissés sans surveillance
  • Les incendies criminels intentionnels
  • Le brûlage de débris
  • L’utilisation d’équipement (y compris les lignes électriques) et les dysfonctionnements
  • Les cigarettes jetées
  • Les feux d’artifice

Les feux dirigés (ou brûlages contrôlés), allumés intentionnellement pour un certain nombre de raisons bénéfiques, dont la réduction des incendies de forêt extrêmes, ont parfois échappé à tout contrôle. Bien qu’ils soient toujours considérés comme une stratégie importante par beaucoup d’experts, avec l’augmentation de la chaleur et les conditions plus sèches, il existe de grands débats quant au moment et à l’endroit où il faut utiliser les brûlages dirigés.

Qu’il soit d’origine naturelle ou humaine, lorsqu’il est question d’incendies de forêt qui atteignent des niveaux incontrôlables, le déclencheur est moins important que les conditions de propagation et d’intensité.

Conditions qui augmentent les risques de feu de forêt

Notre écosystème est toujours dans un état d’équilibre délicat et plusieurs facteurs peuvent avoir un impact négatif sur cette harmonie. Lorsqu’il est question de risques d’incendies de forêt, ces facteurs sont les suivants :

  • La chaleur extrême
  • La sécheresse
  • Les insectes et les maladies qui provoquent la mort prématurée des arbres
  • La déforestation
  • Une mauvaise gestion des terres
  • Les vents violents

La chaleur excessive, les sécheresses, les insectes et les maladies ont affecté la vie humaine et animale bien avant que le changement climatique ne fasse les manchettes, mais la plupart des conditions ci-dessus ont été affectées par les effets du changement climatique ou y ont contribué de manière significative.

Les conditions historiquement plus chaudes et plus sèches que nous connaissons entraînent des vagues de chaleur plus longues, une augmentation de la sécheresse, une baisse de la teneur en eau des sols, la propagation d’insectes nuisibles et une augmentation des combustibles en raison des arbres et des plantes mortes6. La déforestation (principalement causée par l’exploitation forestière) et la mauvaise gestion des terres ont entraîné une augmentation des feux de forêt dans des régions où ils étaient historiquement très rares, notamment les forêts tropicales de l’Amazonie et de l’Indonésie.

Il est aussi important de noter que les feux de forêt peuvent accroître les risques d’inondations, de coulées de boue et de coulées de débris. La destruction des arbres et des prairies susceptibles d’absorber les précipitations peut rendre les zones situées en aval plus vulnérables à ces événements7.

Types de feux de forêt

Il existe trois grandes catégories de feux de forêt 8,9 :

  • Les feux de sol s’allument dans le sol, se nourrissent de matières organiques comme les racines des plantes et couvent jusqu’à ce qu’ils se transforment en un feu de surface ou de couronne.
  • Les feux de surface brûlent dans la végétation morte ou sèche, comme l’herbe desséchée ou les feuilles ou branches tombées au niveau de la surface du sol.
  • Les feux de couronne brûlent la couche supérieure du feuillage d’un arbre. Il s’agit du type de feux le plus intense des trois. Ils sont souvent difficiles à maîtriser.

Les feux de forêt peuvent également être définis en fonction des régions et des climats associés. Le terme « feu incontrôlé » peut être utilisé pour les feux de végétation, mais « feu de forêt » peut être utile pour distinguer les feux dans les zones boisées de ceux dans les prairies ou les zones arbustives. Ces derniers sont souvent appelés « feux de broussailles », à ne pas confondre avec les « feux de brousse », le terme général courant pour les feux de forêt et de prairie en Australie.

Où les risques de feu de forêt augmentent-ils ?

L’évaluation des risques de feu de forêt à l’échelle mondiale est difficile et peut parfois être trompeuse. La fréquence constitue une préoccupation majeure dans certaines régions, mais la gravité et la durée croissantes peuvent être des indicateurs tout aussi troublants dans des régions où le nombre total d’incendies peut en fait diminuer.

Même si des décès sont les conséquences immédiates les plus tragiques d’un incendie, ils sont davantage un indicateur de la réussite ou de l’absence de réussite de la réponse au feu plutôt que du niveau de risque. Les petits incendies mal gérés ou qui s’enflamment de manière inattendue peuvent être plus meurtriers que les incendies de taille ou de durée historique où l’évacuation des zones habitées a été efficace.

De même, les conditions immédiates créées par l’homme — comme la déforestation massive de l’Amazonie par l’industrie — peuvent être difficiles à comparer, relativement aux données, à des conditions climatiques de longue date et en évolution, qu’elles soient dues à l’activité humaine ou non.

Cependant, il est utile de se pencher sur les régions qui ont récemment été touchées par des feux de forêt majeurs, sur les conditions qui ont conduit à ces incendies et sur les indicateurs possibles pour l’avenir.

États-Unis : Les feux de forêt de 2020 ont fait des ravages en Californie (qui a connu six des 20 plus grands incendies de son histoire), dans l’État de Washington et en Oregon. En raison de la sécheresse et de la dégradation croissante des paysages, l’ouest des États-Unis continuera de subir un risque élevé d’incendies dans un avenir prévisible10 Aussi, le sud-ouest des États-Unis devrait également être confronté à des incendies plus graves, qui étaient moins caractéristiques de la région au cours des périodes précédentes11.  

Canada : La saison des feux s’allonge dans presque toutes les régions du pays et d’ici 2100, elle pourrait s’allonger de plus d’un mois dans le centre et l’est du Québec, ainsi que dans le nord de la Colombie-Britannique12.

Australie : L’été australien s’est terminé à la fin du mois de février et même si la saison des incendies a été très calme comparativement à celle de 2019-2020, certaines parties du pays et du continent sont confrontées à certaines des pires inondations de son histoire. Les incendies et les inondations extrêmes sont tous deux considérés comme le résultat d’un réchauffement et de l’atmosphère,13 donc si cette tendance climatique se poursuit comme prévu, d’autres feux incontrôlés pourraient se produire.

Forêt tropicale amazonienne : La déforestation mentionnée précédemment en Amérique du Sud pose depuis longtemps une crise climatique urgente et de nombreux scientifiques craignent que la région ne soit à un point de basculement. Les efforts de reboisement, comme celui de la Forêt Zurich, sont essentiels pour éviter des incendies plus violents et des conséquences mondiales vraiment désastreuses. Il faudra encore beaucoup d’efforts concentrés de la part des gouvernements, des entreprises et des organisations du monde entier pour sortir cette région du gouffre.

Indonésie : La crise de la forêt tropicale indonésienne fait peut-être moins les manchettes que celle de l’Amazonie, cependant des zones plus grandes que les Pays-Bas ont brûlé ces dernières années, dont 30 % sont liées aux entreprises de bois de pulpe et d’huile de palme.14 Comme pour l’Amazonie, un changement de perspective est nécessaire pour donner la priorité à cette urgence environnementale monumentale par rapport aux préoccupations économiques compréhensibles de la région.

Arctique : L’Arctique, qui se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde, a connu en 2020 sa pire saison d’incendies depuis 60 ans.15 Bien que les incendies de forêt dans l’Arctique ne soient pas rares dans le sud sibérien de la région, l’émergence de ce que l’on appelle les « incendies zombies » (feux couvants d’une saison précédente qui peuvent se rallumer) et les incendies dans des zones plus au nord, autrefois considérées comme résistantes aux incendies, inquiète les scientifiques16.   

Ces régions sont loin d’être les seules à être confrontées à l’escalade des incendies de forêt. En 2018, le nombre de feux de forêt a connu une augmentation inquiétante en Europe, et les feux de forêt africaine (qui représentent environ 70 % des incendies dans le monde), ont par le passé été plus contrôlés et en harmonie avec l’écologie du continent. On s’inquiète de plus en plus des stratégies de culture sur brûlis avec l’augmentation du commerce mondial17.

Impacts économiques des feux de forêt

Trop souvent, les discussions relatives aux facteurs climatiques ayant un impact sur les risques d’incendie de forêt se résument à un argument opposant l’écologie et l’économie. Cependant, il s’agit d’une vision à court terme compte tenu des coûts économiques importants des incendies de forêt.

Les coûts des incendies de forêt de 2020 aux États-Unis sont encore en cours d’analyse et les conséquences financières pourraient ne jamais être pleinement connues. Cependant, en 2018 (une année record pour la superficie brûlée jusqu’à ce que 2020 l’éclipse), les incendies de forêt en Californie ont coûté à l’économie américaine plus de 148 milliards de dollars (environ 0,7 % du produit intérieur brut total des États-Unis), dont près de 46 milliards ont été perdus en dehors de l’État18 .

Étant donné la nature interconnectée d’innombrables entreprises, tant au niveau national que mondial, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les coûts ne sont pas contenus par les frontières des États ou des pays. Les interruptions de la chaîne d’approvisionnement, l’augmentation des pertes d’assurance et l’impact potentiel sur la main-d’œuvre de la migration croissante en dehors des régions sujettes aux feux de forêt ne sont que quelques-uns des problèmes à affronter.

Comme pour les ouragans et les tempêtes extrêmes, les incendies de forêt sont des événements qui nécessitent une planification à la fois à long terme et immédiate. Zurich continuera à offrir des ressources pour aider à cette planification, y compris les articles ci-dessous qui offrent des conseils sur les actions d’atténuation, de réponse et de récupération.

 

 

  1. Abram, Nerilie. “Australia’s Angry Summer: This Is What Climate Change Looks Like.” Scientific American, le 31 décembre 2019.
  2. Kirchmeier-Young, M.C., Zwiers, F.W., Gillett, N.P. et al. “Attributing extreme fire risk  in Western Canada to human emissions.” Climactic Change. Vol. 144, issue 2. 2017.
  3. Gray, Ellen. “Satellite Data Record Shows Climate Change's Impact on Fires.” NASA: Global Climate Change: Vital Signs of the Planet, le 10 septembre 2019.
  4. “Wildfires 101.” National Geographic video, le 23 octobre 2017.
  5. National Park Service. “Wildfire Causes and Evaluations.” Accès le 21 juin 2021.
  6. “Climate change increases wildfire risk.” Washington State Department of Ecology. Accès le 21 juin 2021.
  7. Lada, Brian. “How wildfires leave communities vulnerable to flooding, mudslides for years.” AccuWeather. Accès le 23 juin 2021.
  8. “Wildfires.” National Geographic Resource Library.
  9.  National Park Service. “Wildland Fire Spread and Suppression.” Accès le 21 juin 2021.
  10. Singh, Maanvi. “'Unprecedented': the US west’s wildfire catastrophe explained.” The Guardian, le 12 septembre 2020.
  11. Mueller, Stephanie E., et al. “Climate relationships with increasing wildfire in the southwestern US from 1984 to 2015.” Forest Ecology and Management, Vol. 460, le 15 mars 2020.
  12. Government of Canada. “Fire weather: Increases in length of fire season will affect forest ecosystems and both human health and safety.”, le 3 décembre 2020.
  13. Perry, Nick. “Australia endures droughts, fires, floods and marauding mice.” Associated Press, le 26 mars 2021.
  14. Ungku, Fathin. “Nearly a third of Indonesia forest fires are in pulp, palm areas: Greenpeace.” Reuters, le 21 octobre 2020.
  15. Penney, Veronica. “It’s Not Just the West. These Places Are Also on Fire.” The New York Times, le 23 septembre 2020.
  16. Sommer, Shelly. "The Arctic is burning in a whole new way.” Institute of Arctic and Alpine Research. University of Colorado Boulder, le 28 septembre 2020.
  17. Petesch, Carley. “Africa is the ‘fire continent’ but blazes differ from Amazon.” Associated Press, le 28 août 2019.
  18. University College London. “Full cost of California’s wildfires to the US revealed.”, le 7 décembre 2020.

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